Le bonheur au travail Synthèse
Faut-il aimer son travail pour être heureux ? Psychologies Magazine
S’épanouir dans sa profession est une aspiration forte pour beaucoup d’entre nous. Mais parce que nous n’exerçons pas le bon métier ou que nous l’exerçons dans de mauvaises conditions, cela n’est pas toujours possible. Quelles sont les vraies raisons de nos frustrations professionnelles ? Et comment remettre le travail à sa juste place ?
Christilla Pellé-Douël
« Un châtiment pour le péché originel, que l’on s’efforçait d’accomplir le plus rapidement possible puis d’oublier dans l’alcool et la religion »… C’est ainsi qu’était autrefois perçu le travail, raconte Alain de Botton, écrivain et journaliste, auteur de Splendeurs et misères du travail. Le siècle des Lumières a radicalement changé la donne. « Tandis qu’Aristote ne concevait pas que l’on puisse être heureux en étant obligé de gagner sa vie – notre liberté s’accommodant mal de la contrainte –, les philosophes du XVIIIe siècle ont vu la possibilité de trouver une forme d’épanouissement dans l’exercice de son métier. » Aujourd’hui, c’est une obligation culturelle. « Dans notre société de l’accomplissement personnel, le travail est devenu l’un des principaux vecteurs de la réalisation de soi », confirme le sociologue Vincent de Gaulejac. Au point que même lorsque nous occupons un emploi qui ne nous passionne pas, nous cherchons à y trouver un intérêt. Notre conception du travail est désormais intimement liée à une notion d’enrichissement personnel. « Idéalement, nous aspirons à mettre à profit une part précieuse de nous même pour en tirer un revenu confortable, constate Alain de Botton. Cela paraît simple. C’est monstrueusement compliqué. » Car dans la réalité, « ce qu’un employeur attend d’un salarié, ce n’est pas qu’il se fasse plaisir – même s’il l’y encourage –, mais qu’il contribue à la rentabilité de son affaire, l’un n’étant pas toujours compatible avec l’autre », observe Vincent de Gaulejac.
Ne pas se réduire qu'à son activité
« C’est parce que nous y mettons beaucoup de nous-même que le travail nous expose à la déception, voire à de profondes blessures narcissiques, poursuit le sociologue. Car s’il arrive que notre prestation ne convienne pas, c’est notre personne tout entière qui ne fait plus l’affaire. » Plus un métier nécessite d’aptitudes créatrices ou relationnelles, plus cette confusion entre la valeur d’un individu et celle de son travail est fréquente. Et nous sommes les premiers à l’entretenir lorsque, par exemple, « nous questionnons les personnes que nous rencontrons sur leur activité, en présumant que nous allons ainsi découvrir quelque chose de leur identité », indique Alain de Botton. Mais aussi en nous accrochant à la notion de vocation. « Cette forme idéalisée de l’accomplissement professionnel est en réalité une supercherie, estime Pierre Blanc-Sahnoun, coach et psychothérapeute. Car ce métier de passion auquel nous nous croyons destiné est le plus souvent un emprunt : un hommage à un parent ou à un ancêtre, que nous tentons de rendre en reprenant le flambeau de ses désirs contrariés. » Quoi qu’il en soit, ne pas exercer l’activité dont nous rêvions est une souffrance bien réelle.
Éric, 35 ans, se voyait dessinateur de presse et s’est retrouvé à concevoir des emballages. « J’avais l’impression de ne pas être reconnu pour ce que j’étais profondément », confie le jeune homme, qui a fini par démissionner. Terriblement frustrants, ces renoncements dus à une mauvaise orientation ou à la nécessité de gagner sa vie conduisent à une « dévalorisation de l’image de soi difficile à restaurer », pense la psychanalyste Marie-Hélène Brousse.
Avoir le sentiment d'être utile
Exercer le métier de son choix mais dans de mauvaises conditions est un autre motif d’insatisfaction. Françoise, 39 ans, infirmière en hôpital psychiatrique : « On nous demande d’améliorer les relations avec le patient, d’être plus rentables dans le soin, et on nous supprime des postes. La contradiction est intenable. » Les situations qui engendrent des conflits intérieurs sont nombreuses : ne pas parvenir à équilibrer travail et vie privée (les femmes savent à quel point cet exercice est délicat), se trouver face à un dilemme entre sa mission et ses valeurs… Georges, 62 ans, ancien directeur des ressources humaines dans une entreprise de télécommunications, a ainsi été contraint de procéder à des licenciements qu’il désapprouvait. « J’en ai perdu le sommeil », assure-t-il.
« Ce qui nous réjouit, à la fin d’une journée de travail, c’est d’avoir pu amener une amélioration dans la vie de quelqu’un, affirme Alain de Botton. Il ne s’agit pas nécessairement de grands changements. Huiler un gond, aider à retrouver un bagage perdu peuvent être très gratifiants… L’industrialisation a rendu plus abstrait ce sentiment d’être utile. Contrairement aux artisans d’autrefois, qui connaissaient leurs clients, les ouvriers des usines de biscuits, par exemple, ont perdu le bénéfice de connaître ceux qui se régalent de leur production… »
« Lorsque le travail perd son sens éthique, moral, logique, nous faisons taire notre sensibilité, mais le malaise se répercute sur notre vie privée et notre santé », prévient Philippe Davezies, chercheur et enseignant en médecine et santé du travail à l’université Claude-Bernard, à Lyon. « D’où l’absentéisme, d’où la dépression, ajoute Marie-Hélène Brousse. Surtout si quelque chose, dans l’exécution de notre tâche, entre en contradiction avec une exigence profondément ancrée dans notre éducation », comme d’être contraint, pour tenir les délais, de ne pas être trop regardant sur la qualité, alors que l’on a été élevé dans la valorisation du travail bien fait.
Prendre de la distance
« Aujourd’hui encore, deux conceptions du travail s’affrontent, résume Alain de Botton. Schématiquement, celle héritée de la classe ouvrière, pour qui travailler n’est qu’un moyen (de nourrir sa famille, de s’offrir du temps libre), et celle héritée des classes moyennes, qui l’envisagent comme une fin en soi, une condition indispensable au bonheur. En temps de crise, la première vision a tendance à l’emporter, on se réjouit d’avoir du boulot, quel qu’il soit. » Un pragmatisme qui n’interdit pas de vouloir améliorer sa situation professionnelle, sans attendre pour autant qu’elle comble totalement.
« Première étape : faire un pas de côté pour parvenir à réfléchir », recommande Nathalie Bouclier, coach en entreprises. Quelques jours d’arrêt peuvent permettre de casser le rythme et de commencer à identifi er les difficultés : quels sont nos besoins (de structure, d’équipe, de créativité) et nos principales frustrations (manque de liberté, de reconnaissance) ? Quels sont les avantages et les inconvénients du poste que nous occupons (responsabilités, salaire, qualité de vie…) ? « Posez-vous une question toute simple, suggère la coach : si vous deviez tout quitter demain, qu’est-ce qui vous manquerait le plus ? » En négatif, des évidences s’imposent : les collègues, le lieu…
Parfois, il suffira de modifier quelques paramètres (déplacer son bureau, travailler chez soi un jour par semaine…). Mais, souvent, « on s’aperçoit que l’on s’est toujours déterminé en fonction des pressions extérieures, non de ses besoins ». Dès lors, c’est ce sentiment de souveraineté qu’il faut s’attacher à restaurer, « en s’autorisant à formuler ses envies, même les plus folles, de manière à ranimer l’énergie », encourage Nathalie Bouclier. Un bilan de compétences peut s’avérer utile pour transformer ses rêves en objectifs réalistes.
Chercher le bonheur ailleurs
« Ce qui pèse le plus, ce ne sont pas les conditions objectives dans lesquelles nous travaillons, mais le regard que nous portons sur notre activité, pointe Alain de Botton. Quand la souffrance s’installe, un travail de détachement est indispensable. » Au besoin, on cherchera en thérapie « ce qui, dans notre histoire, nous conduit à accepter ou à rejeter un travail sur lequel d’autres portent un regard très différent du nôtre », conseille Marie- Hélène Brousse. Trouver quelles injonctions familiales, quelles fragilités dans l’estime de soi ont orienté notre parcours peut nous aider à faire évoluer la situation.
« Remettre le travail à sa juste place est vital, certifie Marie Hélène Brousse. Il faut accepter le fait que le travail idéal n’existe pas, que la vie professionnelle n’est pas tout et que l’on ne peut pas tout avoir en même temps. » Ce qui manque à notre travail peut et doit être cultivé ailleurs. Carole, 46 ans, conseillère pédagogique, s’est inscrite dans une chorale : « Depuis que je chante, mes difficultés professionnelles reprennent des proportions acceptables, elles ne m’envahissent plus autant… » Alain de Botton se dit « très marqué par ce précepte de saint Augustin qui dit que juger un homme par sa position sociale est une faute. Nous devons nous rappeler que nous étions des individus de valeur avant de commencer à travailler et que nous le serons encore bien après avoir cessé de le faire ».
Doc 2 Bonheur et travail, une ambiguïté moderne
Par Thierry Ménissier | 14/01/2016,
https://acteursdeleconomie.latribune.fr/debats/opinion/2016-01-14/bonheur-et-travail-duel-ou-duo.html
Associer les termes "bonheur" et "travail" ne constitue pas seulement un paradoxe ; cela revient à assumer une des ambiguïtés majeures de la condition contemporaine.
Par Thierry Ménissier, Professeur de philosophie - IAE de Grenoble et équipe de recherches "Philosophie, Pratiques & Langages", Université Grenoble Alpes -, en amont de la conférence du vendredi 22 janvier, programmée par l'IAE Lyon et Acteurs de l'économie-La Tribune. Vous aussi, participez au débat. Soumettez vos questions en commentaires.
Sous la forme que nous connaissons depuis l'essor de la modernité, le travail regroupe presque toutes les contraintes matérielles et sociales que l'on peut imaginer, domination comprise. Malgré cela, il a été conçu par les fondateurs intellectuels de notre mode de vie comme ce qui permet la réalisation de l'humain dans son existence sociale et matérielle - car c'est bien ce qu'affirme la triple autorité d'Adam Smith, de Karl Marx et de Max Weber.
Le geste de ces fondateurs a consisté à nouer indissociablement le travail et la vie des hommes en privilégiant, contre la tradition de la philosophie ancienne, la "vie active" sur la "vie contemplative" (pour reprendre les termes employés par Hannah Arendt).
Être moderne, c'était donc assumer pleinement le rapport entre bonheur et travail, en le considérant tant bien que mal comme structurant. Et c'était possible moyennant la force de la croyance envers le progrès du savoir, le développement industriel et la croissance économique, la conscience politique et l'émancipation sociale.
Ce qui était perdu du côté de l'idéal antique du "bonheur du sage" (qui a toujours été réservé à une élite, quoique non sociale) était en quelque sorte gagné du côté de la satisfaction matérielle et de la tranquillité spirituelle de populations entières. Pour la modernité, et cela dans le cadre d'une vraie construction civilisationnelle, la résolution de la tension entre bonheur et travail passait par l'intégration sociale et par la réalisation d'utopies concrètes.
Réinventer un projet politique pour l'entreprise
Aujourd'hui, en un sens ces utopies se sont réalisées, bien que l'intégration sociale soit loin d'être complète ; les métiers et les emplois se redéfinissent sans cesse sous l'effet de la globalisation et de l'innovation ; et les articles de foi de la modernité ont beaucoup perdu de leur force de persuasion, tandis que l'emploi salarié demeure un des supports fondamentaux, pour tout un chacun, de la satisfaction et de la tranquillité.
Alors que vaut aujourd'hui l'association entre travail et bonheur ? S'il n'est plus une "vocation » (Weber), le travail conserve-t-il son sens ? Quel ordre de faits est amené à compenser la crise de valeurs traversée par le modèle moderne et occidental et à remplacer le travail : la consommation, la religion ?
On peut également faire l'hypothèse que les nouvelles conditions de la production et des services renouvellent en partie la manière moderne d'aborder les relations entre travail et satisfaction/tranquillité. Mais il convient de faire preuve d'imagination et d'inventivité, tant sur le plan des dispositifs sociaux et politiques que dans l'art de manager les équipes. En dialogue avec les pratiques de terrain et l'émergence des technologies innovantes, il apparaît également nécessaire de réinventer un projet politique pour l'entreprise.
DOC 3
Ce à quoi ils tendent de toutes leurs forces, c'est le bonheur général des troupeaux sur le pâturage, avec la sécurité, le bien être et l'allègement de l'existence pour tout le monde. Les deux rengaines qu'ils chantent le plus souvent sont égalités des droits et pitié pour tout ce qui souffre, et ils considèrent la souffrance elle-même comme quelque chose qu'il faut supprimer. Nous, qui voyons les choses sous une autre face, nous qui avons ouvert notre esprit à la question de savoir ou et comment la plante « homme » s'est développée le plus vigoureusement jusqu'ici [...], nous pensons que la dureté, la violence, l'esclavage le péril dans l'âme et dans la rue, que la dissimulation, le stoïcisme, les artifices et les diableries de toutes sortes, que tout ce qui est mauvais, terrible, tyrannique, tout ce qui tiens de la bête de proie et du serpent sert tout aussi bien à l'élévation du type homme qu'à son contraire.
Nietzsche, Par-delà bien et mal, II, L'esprit libre, § 44, Bouquins p. 596.
DOC 4.Le travail chez les Grecs
Dire que le travail et l’artisanat étaient méprisés dans l’antiquité parce qu’ils étaient réservés aux esclaves, c’est un préjugé des historiens modernes. Les Anciens faisaient le raisonnement inverse : ils jugeaient qu’il fallait avoir des esclaves à cause de la nature servile de toutes les occupations qui pourvoyaient aux besoins de la vie. C’est même par ces motifs que l’on défendait et justifiait l’institution de l’esclavage. Travailler, c’était l’asservissement à la nécessité, et cet asservissement était inhérent aux conditions de la vie humaine. Les hommes étant soumis aux nécessités de la vie ne pouvaient se libérer qu’en dominant ceux qu’ils soumettaient de force à la nécessité. La dégradation de l’esclave était un coup du sort, un sort pire que la mort, car il provoquait une métamorphose qui changeait l’homme en un être proche des animaux domestiques. C’est pourquoi si le statut de l’esclave se modifiait, par exemple par l’affranchissement, ou si un changement des conditions politiques générales élevait certaines occupations au rang d’affaires publiques, la “nature” de l’esclave changeait automatiquement.
L’institution de l’esclavage dans l’antiquité (...) fut une tentative pour éliminer des conditions de la vie le travail. Ce que les hommes partagent avec les autres animaux, on ne le considérait pas comme humain. C’était d’ailleurs aussi la raison de la théorie grecque, si mal comprise, de la nature non humaine de l’esclave. Aristote, qui exposa si explicitement cette théorie et qui, sur son lit de mort, libéra ses esclaves, était sans doute moins inconséquent que les modernes ont tendance à le croire. Il ne niait pas que l’esclave fût capable d’être humain; il refusait de donner le nom d’ “hommes” aux membres de l’espèce humaine tant qu’ils étaient totalement soumis à la nécessité.
Arendt, Condition de l'homme moderne, 1958
Doc 5. Une société de travailleurs sans travail
Plus proche, également décisif peut-être, voici un autre événement non moins menaçant. C'est l'avènement de l'automatisation qui, en quelques décennies, probablement videra les usines et libérera l'humanité de son fardeau le plus ancien et le plus naturel, le fardeau du travail, l'asservissement à la nécessité. Là, encore, c'est un aspect fondamental de la condition humaine qui est en jeu, mais la révolte, le désir d'être délivré des peines du labeur, ne sont pas modernes, ils sont aussi vieux que l'histoire. Le fait même d'être affranchi du travail n'est pas nouveau non plus ; il comptait jadis parmi les privilèges les plus solidement établis de la minorité. A cet égard, il semblerait que l'on s'est simplement servi du progrès scientifique et technique pour accomplir ce dont toutes les époques avaient rêvé sans jamais pouvoir y parvenir.
Cela n'est vrai, toutefois, qu'en apparence. L'époque moderne s'accompagne de la glorification théorique du travail et elle arrive en fait à transformer la société tout entière en une société de travailleurs. Le souhait se réalise donc, comme dans les contes de fées, au moment où il ne peut que mystifier. C'est une société de travailleurs que l'on va délivrer des chaînes du travail, et cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté. Dans cette société qui est égalitaire, car c'est ainsi que le travail fait vivre ensemble les hommes, il ne reste plus de classe, plus d'aristocratie politique ou spirituelle, qui puisse provoquer une restauration des autres facultés de l'homme. Même les présidents, les rois, les premiers ministres voient dans leurs fonctions des emplois nécessaires à la vie de la société, et parmi les intellectuels il ne reste que quelques solitaires pour considérer ce qu'ils font comme des œuvres et non comme des moyens de gagner leur vie. Ce que nous avons devant nous, c'est la perspective d'une société de travailleurs sans travail, c'est-à-dire privés de la seule activité qui leur reste. On ne peut rien imaginer de pire.
Arendt, Condition de l'homme moderne, 1958
DOC 6. La course effrénée au travail
La course effrénée au travail -le vice propre au Nouveau Monde- commence déjà, par contagion, à rendre la vieille Europe sauvage et à répandre sur elle une absence d'esprit absolument stupéfiante. On a déjà honte, aujourd'hui, du repos; la méditation prolongée provoque presque des remords. On pense la montre en main, comme on déjeune, le regard rivé au bulletin de la Bourse, -on vit comme un homme qui constamment "pourrait râter" quelque chose. "Faire n'importe quoi plutôt que rien" -ce principe aussi est une corde qui permet de faire passer de vie à trépas toute éducation et tout goût supérieur. Et de même que cette course des gens qui travaillent fait visiblement périr toutes les formes, de même, le sens de la forme lui-même, l'oreille et l'oeil sensibles à la mélodie des mouvements, périssent également. (...) On n'a plus de temps ni de force pour les cérémonies, pour les détours dans l'obligeance, pour l'esprit dans la conversation et pour tout otium en général. (...) Le travail est désormais assuré d'avoir toute la bonne conscience de son côté : la propension à la joie se nomme déjà "besoin de repos" et commence à se ressentir comme un sujet de honte. "Il faut bien songer à sa santé" -ainsi s'excuse-t-on lorsqu'on est pris en flagrant délit de partie de campagne. Oui, il se pourrait bienqu'on en vînt à ne point céder à son penchant pour la vita contemplativa (c'est-à-dire pour aller se promener avec ses pensées et ses amis) sans mauvaise conscience et mépris de soi-même. -Eh bien ! autrefois, c'était tout le contraire : c'était le travail qui portait le poids de la mauvaise conscience. Un homme de noble origine cachait son travail, quand la nécessité le contraignait à travailler. L'esclave travaillait obsédé par le sentiment de faire quelque chose de méprisable en soi. "La noblesse et l'honneur n'habitent que l'otium et le bellum" : voilà ce que faisait entendre la voix du préjugé antique !
Nietzsche, Le gai savoir, §329, 1882
DOC 7 : Caricature de Charb parue dans Charlie Hebdo
