Le roman au XIXème siècle
Balzac, que l'on peut considérer comme un héritier du romantisme et le fondateur du réalisme, va être l'un des premiers à affirmer une volonté d'observer la société, toute la société dans son oeuvre. Le réalisme devient un mouvement théorisé à partir de 1850. Or, Balzac meurt cette année-là. Si l'on se fonde sur la définition de ce qu'est un mouvement, alors Balzac n'appartient pas au mouvement réaliste, puisqu'il n'a jamais manifesté sa volonté d'y adhérer.
Balzac a aussi vécu l'essor du romantisme et, bien qu'il n'y ait pas formellement pris part, on trouve dans son oeuvre l'influence de tout ce qui fait le romantisme.
Si l'on se fonde donc sur le réalisme comme mouvement, Balzac n'est pas un auteur réaliste. Mais il a profondément marqué les auteurs réalistes.
Balzac lorsqu'il écrit La Comédie humaine veut « peindre les deux ou trois mille personnages saillants de [s]on époque et faire concurrence à l'Etat-Civil. » On voit ici deux ambitions : la première est celle d'une oeuvre totalisante ; la seconde est celle de la représentation du réel de son temps.
Il va également déclarer : « La société française allait être l'historien, je ne devais être que le secrétaire ». Balzac n'est donc pas un auteur du mouvement réaliste, mais le réel contemporain est le cadre de son oeuvre.
« La Comédie Humaine » regroupe 137 oeuvres, beaucoup sont des études de moeurs : intitulées « Scènes de la vie parisienne », « Scènes de la vie de province », « Scènes de la vie privée », ou encore « Scènes de la vie militaire », il s'agit d'observer la vie sociale et politique française. On trouve également des oeuvres philosophiques, ou des récits fantastiques, comme « La Peau de chagrin ».
Il utilise un système de personnages récurrents, comme Rastignac, Vautrin ou le docteur Bianchon, que l'on retrouve dans plusieurs récits différents.
Son talent descriptif permet d'introduire l'idée que le milieu est à la fois une image des personnages qui y vivent, mais aussi qu'il est une influence sur ces personnages.
Cette idée d'une grande oeuvre, totalisante, est reprise par Zola qui présente l'histoire d'une famille, les Rougon-Macquart et intitule son ensemble de 20 titres « L'Histoire Naturelle et Sociale d'une famille sous le Second Empire ».
A partir de 1868, il commence à dessiner l'arbre généalogique de cette famille qu'il décrit en développant le thème de l'hérédité : les Rougon-Macquart ont un problème d'alcoolisme qui se retrouvera chez chacun des personnages et presque tous succomberont à cette maladie qui les entraînera dans la déchéance.
Cette idée que l'on ne peut échapper à son hérédité est emblématique du mouvement du naturalisme que Zola fonde.
Le roman réaliste domine donc cette seconde moitié du XIXè : le romancier observe la société de son époque.
Mais il prend aussi parfois position : ce sont les romans engagés ou les romans à thèse.
Parmi ceux-là, il est nécessaire de citer Les Misérables de Victor Hugo. Cette oeuvre immense annonce dès le titre qui sont les héros du roman : les classes populaires, les pauvres.
Hugo, dans l'épigraphe, annonce sa prise de position politique et sociale : « Tant qu’il existera, par le fait des lois et des mœurs, une damnation sociale créant artif iciellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d’une fatalité humaine la destinée qui est divine ; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l’homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l’atrophie de l’enfant par la nuit, ne seront pas résolus ; tant que, dans de certaines régions, l’asphyxie sociale sera possible ; en d’autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles. » Il développe donc le thème de la prostitution féminine, du crime et de la justice, de l'éducation et de la rédemption.
Le roman reste malgré tout un genre qui permet le divertissement : Alexandre Dumas explore les époques historiques, parfois en les revisitant (l'expression consacrée est qu'il « viole l'Histoire de France ») comme l'époque de Louis XIII avec Les trois Mousquetaires, celle d'Henri IV avec La Reine Margot, mais aussi sa propre époque avec Le Comte de Monte-Cristo.
De même Jules Verne écrit de la littérature enfantine : les aventures les plus fabuleuses sont mêlées à des pages didactiques, sur l'ordre de son éditeur Hetzel. Les petits lecteurs ont donc droit à des classifications sur les familles de poissons alors même que Verne invente le premier sous-marin dans Vingt Mille Lieues sous les mers.
Jules Verne, tout comme Antoine Villiers-de-l'Isle Adam, vont fonder le roman de science-fiction français : Jules Verne, à part le sous-marin, invente également une fusée qui irait sur la lune ; Villiers de l'Isle-Adam, dans L'Eve Future invente le premier androïde.
La nouvelle est aussi un genre très prisé dans la seconde moitié du XIXè.
Les nouvelles réalistes sont nombreuses, mais la nouvelle est un genre où le fantastique est extrêmement exploité.
Le plus célèbre auteur de nouvelles fantastiques est Maupassant, mais Antoine Villiers de l'Isle-Adam, ou Théophile Gautier en écriront également
Le terme réalisme est généralement employé pour caractériser un mouvement littéraire et culturel qui se développe en France entre 1850 et 1865.
C’est la peinture, en premier, qui va créer ce mouvement, avec Un Enterrement à Ornans, de Courbet que l'on peut qualifier comme étant le premier tableau réaliste.
Les auteurs principaux de ce mouvement sont Maupassant et Flaubert, Balzac est souvent associé à ce mouvement bien qu'il n'y ait jamais volontairement adhéré. Champfleury est un de ses principaux théoriciens.
Le réalisme étudie le réel contemporain, avec une attention aux milieux modestes et populaires. Le style est souvent le plus plat et le plus neutre possible pour mettre en valeur les idées sans qu’elles soient encombrées par le style. Pour le réalisme, il est donc important de définir l’espace du roman, souvent à l’aide de descriptions précises, puisque le milieu influence l’individu.
A travers la description, les auteurs font passer une atmosphère qui nous présente les personnages qui vivent dans le lieu décrit.
Ainsi, nous pouvons voir que le mouvement réaliste a une volonté pédagogique : il s’agit de montrer la société, toute la société à ceux qui y vivent.
Les auteurs présentent donc la réalité sociale de leur époque. Il s'agit pour eux de montrer, non plus les grands de ce monde mais aussi le peuple.
C'est ainsi que des personnages misérables ou des ouvriers vont entrer dans le roman, alors qu'ils n'apparaissaient auparavant qu'à l'arrière-plan.
D'autres oeuvres vont poursuivre cette dimension de peinture sociale et morale, mais en représentant aussi des couches moins populaires de la société : Bel-Ami présente la corruption de la bourgeoisie et de la haute bourgeoisie ; Madame Bovary présente la bêtise bourgeoise à travers le personnage du pharmacien Homais.
Mais il ne s’agit pas que d’une reproduction, l’art est aussi présent.
Dans la préface de Pierre et Jean , Maupassant écrit : « Faire vrai consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession.
J'en conclus que les Réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des Illusionnistes. "
Le mouvement naturaliste existe en littérature entre 1877 et 1884. Le terme « naturalisme » est utilisé par Emile Zola à partir de 1865.
Deux éléments caractérisent le naturalisme :
- le recours systématique aux sciences, méthodes et savoirs , comme Zola l'indique dans Le Roman Expérimental ;
- la littérature est étendue à des thèmes qu’elle n’explorait pas jusqu’ici, que cela soit les classes sociales populaires, l’étude du corps ou des pulsions physiques.
Parmi les oeuvres du naturalisme, on retiendra Germinie Lacerteux de Jules et Edmond de Goncourt, dont la préface explicite aussi clairement la démarche naturaliste. Zola dira de ce roman : « Les faits sont ici purement physiologiques ; l’intérêt n’est pas dans les incidents, mais dans l’analyse du tempérament de cette fille, de sa chute, de ses luttes, de son agonie. »
Parmi les auteurs du naturalisme, il faut principalement retenir Emile Zola.
Entre 1871 et 1893, il publie une suite de vingt romans, Les Rougon-Macquart, qui présente « l’histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire ».
Zola poursuit deux grands buts :
- une volonté d’exhaustivité : il va donc étudier tous les milieux sociaux ;
- utiliser les sciences : il s’appuiera en particulier sur l’étude des tempéraments dans Thérèse Raquin et sur les lois de l’hérédité avec un arbre généalogique de sa famille fictive.
Il déclare ainsi à un critique : « Vous mettez l’homme dans le cerveau, je le mets dans tous ses organes. Vous isolez l’homme de la nature, je ne le vois pas sans la terre d’où il sort et où il rentre. »
Une telle oeuvre va donc demander de sa part à la fois un travail de documentation précis sur les conditions de vie des classes sociales qu’il va décrire (ainsi, il va visiter des mines et rencontrer des mineurs pour pouvoir écrire Germinal qui décrit ce milieu), mais aussi un travail de description des lieux et des objets, qui finissent par devenir des symboles, comme l'alambic dans L’Assommoir ou la locomotive dans La Bête Humaine.